Le livreur de repas

À Bordeaux, le livreur de repas, «héros» des seniors isolés

AFP Publié hier à 08:38, mis à jour hier à 13:26

REPORTAGE – Depuis le début du confinement, la Ville distribue 1200 repas par jour à des personnes âgées, à domicile ou en résidence, contre 700 en temps normal.Par Le Figaro avec AFPPublié hier à 08:38, mis à jour hier à 13:26

Solitary senior woman eating her lunch at retirement home. Social aid for retirement citizens concept.

Masque sur le visage, Ludovic Gourdial descend de sa camionnette blanche, prend soin de se désinfecter les mains et attrape une caisse rouge dans le compartiment réfrigéré. Pour les Bordelais âgés auxquels il livre quotidiennement un repas, il est un de ces «héros» du confinement.À lire aussi : Coronavirus: Jean Imbert lance des repas à emporter et en livraison à Paris

Une soixantaine de fois par jour, cet employé municipal sonne à une porte, s’annonce – «Bonjour, c’est le repas!» – et dépose les produits alimentaires dans un sac plastique ou un panier.

Parfois, Ludovic est attendu. Des salutations, un échange de sourire, un «Comment ça va, Mme Dubourg?». Pas de contact tactile ni de discussion. Pas le temps et pas le droit en ce moment.

«Ils sont formidables ces livreurs, toujours un sourire. Quand c’est la seule personne qu’on voit dans la journée, ça fait plaisir», dit Solange sur le pas de la porte d’un immeuble bourgeois.

Depuis le début du confinement, la ville de Bordeaux distribue environ 1200 repas par jour à des seniors, à domicile ou en résidence, contre environ 700 en temps normal.

Ludovic, 37 ans, doit désormais livrer une dizaine de seniors en plus. «D’habitude, je rentre, je mets la nourriture dans le frigo, je discute. Là, on les voit en courant d’air». Mais «les bénéficiaires le comprennent très bien, ils ont peur du virus».

Ce livreur, onze ans de métier, assure quand même une forme de veille sociale et sanitaire. Si personne ne répond à la sonnette ou à ses coups à la porte, il téléphone pour s’assurer d’un signe de vie.

Au menu du jour: thon mayonnaise, brandade de morue, orange, yaourt et morceau de pain. Avec en bonus le quotidien Sud Ouest.

«En leur offrant le journal jusqu’à la fin du confinement, on aide ces seniors à garder une ouverture vers l’extérieur», explique à l’AFP Fabien Robert, premier adjoint au maire de Bordeaux.

«Bonne action»

Les avis sur la qualité des mets divergent un peu. «C’est meilleur que je pensais», se félicite Raymonde, qui bénéficie du service le temps du confinement et n’a pas mis le nez dehors «depuis 26 jours».

«C’est bon mais il n’y a pas assez de pain!», lance René, un brin taquin, à Ludovic qu’il attendait en balayant son couloir, cintré dans un tablier brun. «J’ai 94 ans, je n’ai jamais fumé et fait de la natation toute ma vie. Je suis un gars sérieux, même avec les dames!», lance-t-il.

Plus loin, Jeanne, une habituée, juge que la «qualité (des repas) a baissé» et «les menus ne se renouvellent pas».

La cuisine centrale Bordeaux-Mérignac (SIVU), où Ludovic vient charger tous les matins, a dû procéder à une «simplification de l’offre», avec plus de plats préparés et une répétition hebdomadaire des menus, explique Christophe Simon, son directeur général.

«C’est une restauration assez basique en ce moment parce que le SIVU ne tourne pas à plein régime mais habituellement il y a 40% de produits issus de circuits courts et de bio», souligne Fabien Robert.

Selon lui, certains seniors vont conserver la formule: «Ils découvrent que c’est assez pratique et pas très onéreux». Entre 0,5 et 4,5 euros par repas, en fonction de leurs ressources, pour un coût global pour la ville d’environ 7,5 euros.

Rue Paulin, Marcel s’insurge: «Ceux qui disent que c’est pas bon ne savent pas cuisiner!»

Cet homme de 82 ans au dos courbé trouve que Ludovic Gourdial «a bien du courage»: «C’est un héros, il prend des risques».À lire aussi : Avec le confinement, la livraison par drones espère décoller

Le livreur, dont la compagne travaille au CHU, se dit «touché». «C’est une bonne action que je fais. On égaye leur journée», confie-t-il. «Certaines personnes, je ne sais pas comment ils feraient sans nous». Marcel ne dit pas le contraire: «Ce service pour moi, c’est vital. Comme la carte!»

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